Le monde du gamelan
Dance && répertoires

Danse

Dance & repertoires


Corrélation entre danse, gamelan et autres arts

À Java et Bali, la tradition de danse et de théâtre manifeste plusieurs traits particuliers. On pourrait dire qu'elle est "de type indien". Mais ce serait trop vague. Il faut percevoir ces traits en tant qu'agglomérat caractérisant la tradition, et montrant du même coup ses différences radicales avec les nouvelles formes entrantes islamisées ou occidentalisées.

Gamelan
Les régions qui jouissent d'une tradition de wayang ou de danse indienne connaissent aussi la tradition du gamelan. La réciproque est vraie aussi : partout où il y a du gamelan, il y a également une tradition de wayang ou de danse. La danse et les arts de théâtre sont intimement liés au gamelan. C'est une règle générale mais pas stricte. Par exemple, le gambuh est une danse à Bali qui n'est pas accompagn&eaute;e d'un gamelan. Le wayang kulit malais n'est pas joué avec un gamelan. Néanmoins de tels arts de théàtre ne sont pas trop éloignés du monde culturel danse-gamelan. La musique du gambuh (wayang kulit malais) est bien percussive, elle a le kendang (gendang), gongs bulbés, et elle appartient à la musique traditionnelle de Bali (péninsule malaise). Les autres arts de la scène étaient sans doute dans la même situation dans le Java et Bali ancien : chaque danse ou wayang avait son propre ensemble de percussion adapté, de formation plus simple que les gamelans d'aujourd'hui. Mais il est clair que le gamelan est devenu en fin de compte le meilleur représentant musical de la tradition de type indien de danse et théâtre à Java et Bali.

Les danses islamiques et les pièces occidentalisées ont bien pris pied sur Java et il est frappant d'observer le contraste entre leur musique et le gamelan indigène. Les instruments musicaux typiquement associés aux danses et chant des territoires musulmans comprennent le rebana (tambour sur cadre), gambus (lute moyen-oriental), serunai (instrument à vent à anche), et parfois des instruments occidentaux comme l'accordéon et le violon. C'est un monde musical complètement différent du gamelan, bien que la présence occasionnelle de kendang/gendang et gongs bulbés reflète un substrat indo-javanais ancien ou une influence javanaise ultérieure et nous rappelle où nous sommes.

Indianité de la danse
Les danses sont de type indien plus ou moins prononcé. Elles ont des racines en Inde. Mais elles montrent parfois aussi une forte influence du type lent et doux de danse locale (tribale ?).

Les représentations islamiques sont de nature très différente : l'humeur est plus grave, le cadre décoratif plus sobre. D'ailleurs elles ne sont même pas tournées vers la danse. S'il y a danse, elle peut incorporer diverses influences : du substrat indo-javanais, du peñcak silat, et même du style vulgaire qu'on voit dans les films hindis.

Schémas codifiés, symboliques
Gestes de danse ; styles de danse ; motifs décoratifs du danseur, de la marionnette (plate ou golèk) ou du masque… tout nous renseigne sur le personnage et ce qu'il symbolise. L'expression de l'œil du danseur, du masque ou de la marionnette est fondamentale. Sur le danseur, chaque partie du visage et des membres, le costume et la parure peuvent donner des connotations et dénotations précises. Sur la marionnette et le masque ; forme des dents, des lèvres, du nez, des cheveux, des bras, des ongles, ornements corporels et couleurs… tout suit un riche langage de codes. Comme dans la danse, la manière dont la marionnette ou le masque bouge est révélateur aussi. L'importance des codes et ce qu'ils signifient sont enracinés en Inde mais sont maintenant plus développés et variés à Java et Bali.

Le théâtre d'ombres existe dans d'autres pays mais c'est à Java, Bali et la péninsule malaise que les marionnettes, les codes et leur lien aux histoires sont les plus riches et développés. Étant non-figuratifs, les représentations islamiques n'ont aucune chance de même approcher la riche multiplicité pictoriale du wayang. La représentation d'êtres vivants est défendu. Il y a des théâtres d'ombres jouant des histoires musulmanes à Java (wayang ménak) et Lombok (wayang Sasak) mais ceux-ci sont des exceptions locales récentes qui confirment la règle.

Histoires
Les histoires jouées par les marionnettes et danseurs sont issues de l'Inde. Les deux noms typiquement évoqués sont Ramayana et Mahabharata. Mais ce sont toujours des extraits ou résumés qui sont joués. Et les détails peuvent varier, une histoire n'a pas de composition officielle fixe. Un large corpus d'histoires sont inspirées par le Ramayana et le Mahabharata et sont de création javanaise. Elles gardent les mêmes stéréotypes de personnages, cadres et situations et suivent des schémas semblables. En fait, toutes ces histoires (les premières et les dernières) constituent la part principale du corpus littéraire javano-balinais, qui est d'une même sorte, enracinée dans la littérature hindouiste et bouddhique. Les arts de la danse, des marionnettes et des autres théâtres sont liés à ces histoires mais aussi à leurs saveurs, symboles et motifs artistiques.

Les formes de théâtre occidentalisées, telle que le ketoprak, ou des régions islamisées, comme le bangsawan, se sont développées dans les régions malaises et javanaises. Nous voyons tout de suite que ces nouvelles formes n'appartiennent pas à la tradition théâtrale originelle de type indien. Par exemple, le répertoire d'histoires est étranger, venant du Moyen-Orient ou d'inspiration historique occidentale. Mais bien sûr, une fois dans Java pendant quelque temps, il est naturel que certaines histoires javanaises aient bien fini d'entrer dans leur repertoire, perdant beaucoup de la couleur et du charisme qu'elles ont dans leur cadre original de wayang et gamelan.

Reliefs
Les histoires sont aussi dépeintes sur des bas-reliefs en pierre ou en bois. Les reliefs ont une importance documentatoire, donnant des indices sur la danse dans l'ancien Java, mais aussi sur la vie dans l'île autrefois. On peut reconnaître les mêmes éléments et dans les histoires et dans les reliefs. Les reliefs ont un autre lien avec la dance et les marionnettes d'ombre parce que tous les trois suivent un fond artistique commun. Les reliefs montrent bien de véritables poses de danse. Des événements représentés sur la pierre ancienne peuvent parfois être reconnus sur la scène de nos jours. Les reliefs de Java Oriental montrent une forte influence des marionnettes plates. Même certaines danses peuvent montrer une influence venant de la manière dont bougent les marionnettes plates. Ici aussi pourrait résider un lien ancien avec l'Inde : dans les deux pays, certains styles de peinture ressemblent aux marionnettes plates. On pourrait aussi se demander si la peinture, un art à deux dimensions, a anciennement influencé le style des marionnettes d'ombres qu'on voit aujourd'hui.

Enraciné dans sa civilisation
Musique, danse, théâtre d'ombres et littérature sont profondément enracinés dans la culture javano-balinaise. C'est parce que dans les cultures indianisées, la danse en tant que telle est une activité traditionnelle importante et a un rôle rituel. Cela est vrai non seulement pour la danse mais aussi pour le théâtre dansé et les marionnettes : les représentations d'histoires en général. Même la musique, pour autant qu'au moins Bali soit concernée, semble représenter des histoires au moyen de son rythme même controllé par les tambours ; c'est comme un relief sonore.

 

 À propos du site… Date de cette page : 26 SEP 2005